Co-Coordination : Nataka et Solange partagent leur processus d’appropriation du Co-leadership
Octobre 2019: QAYN achève un long processus de changement de leadership qui a duré trois ans; processus qui fut couronné par le recrutement de deux co-coordonnatrices.
Photo Credit: Stéphane Simporé
Dans la sous-région, QAYN a toujours été connue pour son fort leadership transformationnel. Penser à un co-leadership au sein du mouvement queer féministe en Afrique de l’Ouest est, en soi, une innovation.
Les penseurs et penseuses de ce mode de leadership sont simplement des génies qui avaient en tête les intérêts supérieurs de QAYN.
Quelques mois après leur prise de fonction,les deux Co-Co (comme les co-coordonnatrices aiment s’appeler et se faire appeler), ou le duo SOLNAT (pour Awa et Simon, consultantEs de QAYN), nous partagent comment elle/il s’approprient leur rôle de Co-leader.
1. Communication
Le co-leadership, c’est beaucoup de communication. Parler, parler et encore parler. Heureusement que nous nous parlons et que ceci avait commencé bien avant que nous ne devenions Co-Co. En effet, nous nous connaissions avant, vivions dans la même ville et avons même participé ensemble à la quatrième École Activiste de QAYN à Dakar.
Nous parlons pour partager nos réflexions, pour les améliorer, pour les enrichir. Nous communiquons pour planifier et mettre en œuvre des projets. Nous parlons pour mettre en commun nos expériences, pour nous améliorer, pour nous enrichir, pour grandir, car nos passés et nos expériences ne sont certes pas les mêmes, mais ils se complètent.
Nous échangeons à propos de nos émotions pour se réguler mutuellement, pour se donner force et énergie dans le travail et au-delà. Nos échanges portent par exemple sur nos plans de déménagement dans ce nouveau pays qu’est le Burkina Faso, sur notre vision de l’organisation pour les 5 ans à venir, puisqu’il faut élaborer un nouveau plan stratégique ; chacunE dans son coin et dans sa singularité, la somme de nos efforts nous rendant plus fortEs que jamais.
2. Partage de Responsabilités
Le co-leadership, c’est aussi comprendre que l’on n’est pas seulE à la tête de l’organisation dont le poids est lourd et les attentes énormes. Gérer le personnel, communiquer avec le Conseil des Conseillères, concevoir les projets, entrer en contact avec les partenaires, rédiger les contrats, négocier avec les consultantEs, terminer les contrats avec certainEs, continuer le processus avec
l’hôte fiscal, tout ceci en s’assurant que tous les principes de féminisme et de panafricanisme de l’organisation sont mis en pratique. Respecter les réglementations du pays, être à l’écoute des membres du Secrétariat, organiser les grandes rencontres, élaborer l’ordre du jour, être informéE des espaces dans lesquelles l’on peut être utile, s’instruire sur l’histoire de l’organisation, la communication, les documents
organisationnels… C’est du travail, c’est de l’énergie, c’est de la passion. Le co-leadership, c’est le partage des responsabilités, mais aussi des défis et des réussites.
3. Amitié
Le co-leadership, c’est comme l’amitié. Les responsabilités d’une amitié ne retombent pas sur une seule personne mais sur toutes les parties impliquées afin que cette amitié puisse être sincère et
équilibrée. Qui dit amitié, dit amour. Il faut l’apport de chacunE. Imaginez une organisation qui est gérée comme l’on gère son amour; une organisation qui est gérée avec amour. QAYN est avant tout notre Amour. Nous y sommes par passion et par amour parce que nous croyons en sa vision, en sa mission, en ses objectifs, et sommes fierEs de ses réalisations. Et tout est fait par amour.
Quand deux personnes partagent les mêmes intérêts, la même vision, et la même passion, il devient très facile de partager, de tout partager, de tout gérer; par amour pour l’action, par amour pour l’impact que cette action va créer pour l’organisation, pour notre communauté et pour la société. Grâce à l’amour, on peut transcender les différences personnelles, ces dernières devenant alors des complémentarités enrichissantes.
4. Principes et Valeurs Féministes
Le co-leadership, c'est aussi le retour aux principes et aux valeurs du féminisme, à l’égalité, et à la valorisation. Nous nous sommes renduEs compte que les institutions où le co-leadership est le maître-mot sont des organisations fortes et puissantes dans leurs actions et dans leur impact. Le partage du pouvoir, surtout dans une position de prise de décision, est la meilleure manière d’être équitable, juste et redevable envers le travail que nous faisons, envers notre communauté et notre mouvement.
5. Silence
Si le co-leadership c’est savoir parler, communiquer, partager, c’est aussi savoir se taire et respecter les silences de l’autre, ses moments de réflexion. C’est reconnaître que l’on n’a pas toujours besoin d’avoir un point de vue sur tout. C’est savoir reconnaître et respecter les moments de réflexion et les quêtes d’inspiration de l’autre, et être en mesure de capitaliser sur ses moments de créativité. C’est aussi ça, co-coordonner: comprendre et respecter le rythme de chacunE.
6. Complémentarité
Le co-leadership, c’est la complémentarité. C’est savoir apprécier et optimiser les forces de l’autre mais aussi compenser ses faiblesses. C’est savoir se parler à demi-mot, à travers les regards, les gestes. C’est comprendre l’autre dans ses écrits, mais aussi dans sa complexité linguistique. C’est savoir faire place au Français, au Mina ou au Kinyarwanda. Nous sommes après tout une organisation panafricaniste qui devrait savoir mettre en valeur tout le matrimoine culturel, linguistique et artistique que nous reflétons.
7. Soutien Mutuel
Le co-leadership, c’est aussi se donner le temps de se connaître, d’accorder nos violons, de comprendre les talents et les sources de bonheur de chacunE. C’est se comprendre sans trop de mots. Un regard, un geste, une respiration, un clin d’œil. Pour montrer à l’autre que l’on est sur la même longueur d’onde. C’est lui dire Go! Go! Go! juste par un petit sourire d’encouragement ou une tape sur l’épaule. Le co-leadership, c’est se féliciter, se motiver, s’encourager et s’accorder, parfois sans avoir à prononcer un mot. C’est comprendre la communication non verbale de l’autre et avancer ensemble.
Prendre le temps de se lire et de se comprendre, de s’aimer et de connaître les passions de l’autre; se remettre en question et s’encourager; savoir ne pas être d’accord tout en respectant l’autre,
voilà les bases d’un vrai co-leadership.
8. Compassion
Enfin, le co-leadership, c’est élargir les possibilités d’entrer en contact avec des personnes diverses et de se voir à travers elles. C’est se reconnaître dans les autres et comprendre que leurs expériences pourraient ou auraient pu être les-nôtres. Voilà la beauté d’avoir deux leaders charismatiques, authentiques, différents mais complémentaires.
Nous sommes en bonne voie. Nous avançons et nous y arriverons car nous prenons le temps de bâtir des fondements solides pour notre co-leadership. Et même dans les moments de crise, nous sommes confiantEs que nous saurons nous en sortir avec brio car QAYN est notre amour !!!
Nos meilleurs vœux pour 2020 !
Nataka et Solange
QAYN
CO-CO